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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

— Jamais de la vie ! répondit l’autre fièrement. Il a une jambe courte d’au moins une aune, et la tête rentrée dans les épaules — il semblait lui reprocher son infirmité, — c’est le lampiste, ajouta-t-il dédaigneusement.

C’était là une première déception pour le petit Parisien ; mais Modeste Vidal le réconforta par quelques paroles d’encouragement, et le vieux savant put reprendre l’historique du château.

Il fit observer que les différences de style qu’il accuse indiquent assez qu’il est l’œuvre de divers siècles. Ce château fondé par les comtes de Blois a été, en effet, agrandi par Louis XI, François Ier, Louis XII, Louis XIII ou plus exactement son frère Gaston d’Orléans, et enfin Louis XIV.

— Sachez bien, dit M. Pascalet, que le château de Blois n’a pris toute son importance qu’en devenant l’apanage des princes de la famille royale ; à la fin du quatorzième siècle, le château passa avec le comté de Blois tout entier entre les mains de Louis d’Orléans, frère de Charles VI : il eut ce beau domaine, à la mort de Guy de Châtillon, auquel il l’avait acheté en le payant au moyen de la riche dot que lui avait apportée Valentine de Milan, sa femme. Le comte de Blois s’en était réservé la jouissance sa vie durant ; mais au moment de la vente, il reçut comptant deux cent mille couronnes d’or, qui équivaudraient à deux millions quatre cent mille francs de notre monnaie.

— Franchement, c’était pour rien ! observa le musicien.

— Après l’assassinat de son mari par le duc de Bourgogne, reprit l’homme de lettres, Valentine de Milan se retira avec ses enfants au château de Blois. Ce fut ici que des messagers vinrent annoncer au petit-fils de Louis d’Orléans la mort inopinée du roi Charles VIII, qui l’appelait au trône. Celui qui devait être Louis XII, et mériter par la sagesse de son administration le glorieux surnom de Père du peuple, était né au château de Blois. Cette résidence lui plaisait beaucoup.

» La reine Anne de Bretagne y rendit le dernier soupir. François Ier parut souvent à Blois ; ses préférences furent plus tard pour le château de Chambord, mais Henri II et François II, Catherine de Médicis et Henri III rendirent son lustre à Blois, qui vit alors des fêtes éclatantes et de brillants tournois ; les noces du duc d’Alençon avec Marguerite d’Anjou, celles de Henri IV avec Marguerite de Valois.

» Henri III convoqua à Blois les États généraux du royaume. Le duc de Guise, chef du parti de la Ligue, se montra audacieux au point que le roi ne trouva d’autre moyen de se débarrasser de lui qu’en le faisant assassiner. Le