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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Pittoresquement juché à l’extrémité de rochers coupés à pic de plusieurs côtés et dominant de très haut le cours de la Varenne, apparaissait Domfront. Outre les tours — dont quelques-unes crénelées encore — de ses anciens remparts, Domfront montre aussi les ruines d’un château avec donjon. On devine tout de suite une ville forte du moyen âge, et ses murailles racontent les sièges nombreux soutenus soit contre les Français, soit contre les Anglais qui s’en disputèrent ardemment la possession, soit un peu plus tard, durant les guerres de religion, contre les catholiques et contre les huguenots. Finalement Henri IV fit démanteler la forteresse. L’ancienne capitale du pays d’Houlme n’est plus qu’un chef-lieu d’arrondissement comptant environ 4,500 habitants. — Au-dessous des ruines du château, au bord de la Varenne, l’église de Notre-Dame-sur-l’Eau, datant du onzième siècle — comme la forteresse, — est classée parmi nos monuments historiques, ce qui n’a pas empêché l’administration des ponts et chaussées d’en faire abattre la nef pour le redressement de la route d’Alençon à Saint-Malo.

Mais ne nous attardons pas : les chemins de fer ne tolèrent pas les longues descriptions : déjà nous touchons à Flers.

Ici la ville est toute moderne. Elle possédait à peine 3,000 habitants en 1820, elle en a aujourd’hui 11,000. D’où vient cet accroissement si peu ordinaire ? Est-il besoin de le dire ? Il est dû à l’industrie. La filature, la teinture, le blanchiment du coton et du fil, le tissage, occupent vingt-huit mille ouvriers à Flers et dans son rayon, — Condé-sur-Noireau, la Ferté-Macé ; — le travail industriel se combine dans tout l’arrondissement avec le travail agricole. Fiers fabrique des coutils rayés pour literies, des articles pour chemises, pantalons, du linge de table damassé, du satin pour ameublement, des toiles de coton, etc.

On voit bien, même de loin, que les rues de Flers sont larges, bien percées ; les maisons en pierres noirâtres qui les bordent leur donnent un aspect sévère ; mais il y a de belles façades ; son église date d’une vingtaine d’années.

Est-ce à dire qu’il n’y ait aucun souvenir d’autrefois dans cette cité assez heureuse pour n’avoir pas d’histoire ? Non. A la lisière d’un parc immense, le château de ses anciens seigneurs, entouré d’eaux vives, flanqué de tours à créneaux et à mâchicoulis, coiffées d’un dôme en forme de cloche et surmontées de lanternes, rappelle l’existence des barons de Flers et leur rôle personnel dans les guerres qui agitèrent la Normandie pendant tout le moyen âge.

La grande-préoccupation de Méloir était de savoir, lorsqu’il y avait une