Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/81

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Louis XI, étant dauphin, avait longtemps vécu à la cour des ducs, toujours l’œil aux aguets, voyant tout, observant tout, remarquant soigneusement les bonnes coutumes. Il n’avait garde de laisser passer celle-là : cette manière ingénieuse et neuve de battre monnaie, d’être généreux sans bourse délier, lui revenait plus que je ne saurais dire ; il l’avait notée favorablement sur ses tablettes. Devenu roi, il ne l’oublia pas, et voulut la mettre en pratique. Au fait, le trésor royal n’aurait jamais suffi pour reconnaître les mille et mille services de tout genre que l’on rendait à un roi qui avait tant d’affaires ; non pas que je veuille parler ici des gages de ses domestiques, des officiers de sa maison ; non, de ceux-là, il n’en avait cure, et les payait peu ou point ; les actions d’éclat, les faits héroïques, guère davantage : témoin cette intrépide normande qui avait sauvé la ville de Saint-Lô, et à qui il donna pour toute récompense soixante écus et un grand merci ; certes, la Chambre des comptes n’eut pas le mot à souffler ; mais, en revanche, ces agents intrépides, prêts à tout entreprendre, à tout oser, à tout faire, se vendant, se louant, corps, âme et conscience, ne redoutant ni pluie, ni grêle, ni Dieu, ni diable, ni potence, et par dessus tout cela, discrets comme des confesseurs, ah ! ceux-là, ils étaient bien payés. Aussi ils pullulaient autour de lui ; c’était