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LE PORTRAIT DE LA DAME VERTE.

à brûle-pourpoint. En me parlant hier de l’Exposition : « Tenez, me disait-il, voila Amaury qui envoie au Salon un portrait bien plat, sans modelé, sans couleur ; on le tourne en ridicule dans les journaux, on s’en moque partout, et cela me retombe sur le nez. »

C’était bien cruel pour moi, et j’avoue qu’après ce qu’il m’avait dit devant ce portrait, je m’étais cru le droit de l’exposer. Dans tous les cas, il aurait pu me le défendre, et, certes, je me serais soumis.

Je lui ai pardonné le mal qu’il m’a fait ce jour-là, et j’ai même excusé cette espèce d’abandon qu’il faisait de nous, en pensant que cet homme qui avait lutté pendant vingt ans et supporté la misère pour une idée, pouvait craindre avec raison de la voir compromise par nos ouvrages, au moment où il paraissait atteindre le but, et où le succès venait à lui.

Ce qu’on pourrait peut-être reprocher à M. Ingres comme professeur, c’est un manque de largeur dans les idées, disons le mot, une mesquinerie, qu’il avait puisée, je n’en doute pas, dans les écoles, où la rivalité bête et envieuse que l’on y entretient se cache sous le nom d’émulation.

Quoi de plus sot en effet, et je dirai de moins moral, que ces récompenses, ces prix qui ne