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L’ATELIER D’INGRES.

au-dessus de la porte d’entrée, fort près, par conséquent de la Jeanne Grey. La foule, qui se portait toujours de ce côté, me permettait souvent d’entendre, sans être vu, les quelques observations qu’inspirait mon pauvre tableau. Un jour, un gros monsieur à lunettes d’or demanda, près de moi, à son fils qui tenait le livret :

« De qui est ce jeune berger ?

— D’un élève d’Ingres, répondit le jeune homme, en me nommant.

— Ah ! d’un élève d’Ingres ! c’est étonnant ! » Et tournant les yeux du côté du Saint Symphorien : « Son maître muscle… Il ne muscle pas, lui… Il musclera plus tard, ajouta-t-il, » pensant probablement que mon éducation n’était pas achevée dans ce sens.

Un autre jour, madame de Girardin arrive chez ma sœur, et du pas de la porte :

« Tu sais, lui dit-elle, comment j’appelle le tableau d’Amaury ? Le poulet au cresson.

— Et de ces poulets qui font renvoyer une cuisinière, » ajouta madame Gabriac, sa cousine, qui était là ; et nous tous de rire.

Ah ! que tout cela était gai et charmant ! Quels souvenirs aimables me rappelle le nom de cette femme si admirablement douée, et que son esprit peut-être a empêchée d’avoir du génie. Que de saillies plus amusantes les unes que les au-