Page:Amiel - Charles le Téméraire, 1876.djvu/64

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Écoute. — Quand je vins du Val-de-Ruz ici,
Et même après avoir chez tes parents pris femme,
— Quelque trente ans de ça — qu’étais-je ? Sur mon âme,
Peu de chose, un colon dépendant, un censier.
Mais je suis aujourd’hui libre et franc tenancier,
Pouvant aimer, aimant qui je veux. Ce que j’aime,
C’est la paix. Or, le duc ici, ni Berne même
Ne me plaît, car si l’un amène le canon,
L’autre a bien provoqué cette querelle. Non,
Aucun des deux partis n’est le mien. Mais que faire ?
Je suis seul contre deux à la maison, beau-frère.
Ulrich vit dans les bois et sur le lac, chassant,
Péchant comme ferait un montagnard pur sang.
Il n’est, hors ces exploits, rien qui le réjouisse ;
Bref, ta sœur est tout Berne et ton neveu tout Suisse.
Moi, pour avoir la paix, du moins à mon foyer,
Ma foi, je reste neutre en sage métayer.

RUDOLF.

C’est prudent. — Mais peut-on espérer que la ville
Réchappe ?