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distractions de pensée, ouvrières inutiles qui dérangent les bonnes ; les tentations de toute sorte, courtisanes provocantes qui détournent les travailleurs ; les curiosités et les découragements, bandes de pillards incorrigibles qui empêchent de produire et qui ne produisent rien. Ainsi les empires se fondent par la guerre. Le carnage des frelons est la première assise de la ruche. La vie est trop courte pour qu’on puisse poursuivre à la fois le multiple et le simple, le plaisir et la gloire, le joli et le grand.

CLIII. — L’HOMME.

L’homme n’est que ce qu’il devient, vérité profonde ; l’homme ne devient que ce qu’il est, vérité plus profonde encore.

CLIV. — LA PHILOSOPHIE.

La philosophie est une manière de saisir les choses, un mode de perception de la réalité. Elle ne pose pas le dilemme de religion ou de philosophie, mais celui de religion subie ou éprouvée, non comprise ou comprise. Elle ne crée pas la nature, l’homme ou Dieu, mais elle les trouve et cherche à entrer en eux. La philosophie c’est la conscience se comprenant elle-même avec tout ce qu’elle contient. La conscience peut contenir une vie nouvelle, le fait de la régénération et du salut, l’expérience chrétienne. L’intelligence de la conscience chrétienne est une partie intégrante de la philo-