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Enfants, qu’avez-vous fait ? À mon âme inquiète
Votre voix paraît triste et de pensers cuisants
Tu repeuples mon âme, ô chanson indiscrète…
Qu’avez-vous fait, enfants ?

Loin de me consoler, ce riant badinage
Jusqu’au fond de mon cœur est venu me troubler,
Et sur mon front, hélas ! ramène le nuage
Loin de me consoler.

On ne peut donc te fuir, souvenir qu’on déteste,
Serpent aux crocs aigus qui ne veux pas mourir !
Vipère, quand au cœur nous mord ta dent funeste,
On ne peut donc te fuir !

Allons ! dévore-moi, souvenir ! La souffrance
Devra, je le sens bien, durer autant que toi ;
Je vis, il n’est de mort en moi que l’espérance :
Allons ! dévore-moi !