Loudun, pensait, avec beaucoup de monde, que
sa fille, très-jolie personne et fort enviée, avait
accordé les dernières faveurs à Grandier. On disait
même en ce temps-là que la jeune personne était
accouchée, et qu’une de ses amies, Marthe Pelletier,
dont la fortune était plus que médiocre, avait
pris l’enfant et la honte à sa charge. Dans le fait,
Marthe présenta au baptême et mit en nourrice
un enfant dont elle se disait mère. À la poursuite
de Trinquant, procureur du roi, on arrêta cette
fille ; interrogée sur l’enfant, elle soutint l’avoir
fait ; mais le public se moqua de cette procédure ;
on ne voulut pas cesser de croire que mademoiselle
Trinquant fût la véritable mère et Grandier le
père.
Comme ces deux filles étaient au couvent des Ursulines, on répandit le bruit que le curé Grandier était magicien, qu’il avait logé le diable dans le corps des Ursulines de cette ville, que Leviathan chef de cinquante démons, était, par la vertu des exorcismes, sorti du corps d’une de ces filles ; que le diable Balaam, par la même vertu, avait abandonné le corps de la mère prieure de ce couvent ; enfin, que le diable avait écrit une lettre au curé Grandier, datée de son cabinet en enfer. Les gens