visiblement mes secrètes agitations. J’étais pâle, et
il y avait dans mes paroles et dans mes mouvements
de l’embarras. Les jeunes gens s’en aperçurent
et m’en demandèrent la cause. Je répondis
que j’avais beaucoup souffert dans la journée de la
fatigue et de l’excès du froid. Ils cessèrent de
m’embarrasser par leurs questions, et je m’efforçai
de bannir de mon esprit la vue du danger qui
m’environnait. Je parlai de l’Allemagne, du dessein
de m’y rendre bientôt, etc. La baronne me
répondait avec beaucoup de politesse. Elle m’assura
que le plaisir de faire connaissance avec moi
la dédommageait bien du retard qu’éprouvait son
voyage, et m’invita d’une manière très-pressante
à faire quelque séjour au château de Lenderberg.
Tandis qu’elle parlait ainsi, les deux jeunes gens
se regardaient avec un sourire malin. Je vis et je
compris fort bien leur sourire ; mais je cachai
l’émotion qu’il venait d’exciter dans mon cœur.
Je continuai de m’entretenir avec la baronne ; il y
avait souvent si peu de liaison dans mes discours
qu’elle commença, comme elle me l’a depuis avoué,
à douter si j’avais bien l’usage de ma raison. À
dire vrai, tandis que je parlais d’un objet, toutes
mes idées se portaient sur un autre. Je songeais
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