Page:Amours, galanteries, intrigues, ruses et crimes des capucins et des religieuses, 1788.djvu/463

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j’entendis marcher quelqu’un qui s’approchait de la cellule ; je m’éloignai vite de la porte. Un rideau qui couvrait un grand crucifix m’offrit une retraite ; je courus me cacher derrière. La porte s’ouvrit, et l’abbesse entra suivie de quatre autres religieuses ; elles s’approchèrent du lit d’Agnès. L’abbesse lui reprocha sa faiblesse dans les termes les plus durs. Elle lui dit qu’elle déshonorait la maison, qu’un monstre comme elle ne méritait pas de vivre. Puis elle lui ordonna de boire une liqueur contenue dans un vase que lui présentait une des religieuses. Inquiète sur les effets de ce breuvage, et craignant de se trouver sur le bord de l’éternité, la malheureuse enfant tâcha par les prières les plus touchantes d’exciter la pitié de l’abbesse. Elle demanda la vie dans des termes qui auraient attendri le cœur d’un tigre ; elle promit de se soumettre à toutes les punitions qu’on voudrait lui infliger, la honte, la prison, les tourments ; elle supporterait tout, pourvu qu’on lui laissât la vie, qu’on lui accordât seulement un mois, une semaine, un jour. Son impitoyable ennemie écouta sans se laisser émouvoir ses instantes prières. Elle lui dit que d’abord elle s’était proposée de la laisser vivre, et que si elle avait changé d’avis, elle