Marcel lui répondit en souriant :
— Le service que je te demande s’accorde parfaitement avec la sécurité de la république et la tienne.
Sur un signe de Lardillon, Marcel s’assit :
— Citoyen substitut, dit-il, tu sais que depuis deux ans je conspire contre tes amis et que je suis l’auteur de l’écrit intitulé : les Autels de la Peur. Tu ne me feras pas de faveur en m’arrêtant. Tu ne feras que ton devoir. Aussi n’est-ce pas là le service que je te demande. Mais écoute-moi : j’aime.
Lardillon inclina la tête pour marquer qu’il approuvait ce sentiment.
— Je sais que tu n’es pas insensible, citoyen Lardillon ; je te prie de me réunir à celle que j’aime et de m’envoyer immédiatement à Port-Libre.
— Eh ! eh ! dit Lardillon avec un sourire sur ses lèvres à la fois fines et fortes, c’est plus que la vie, c’est le bonheur que tu me demandes, citoyen.
Il allongea le bras du côté de la chambre à coucher et cria :
— Épicharis ! Épicharis !
Une grande femme brune apparut les bras et la gorge nus, en chemise et en jupon, une cocarde dans les cheveux.
— Ma nymphe, lui dit Lardillon en l’attirant sur ses genoux, contemple le visage de ce citoyen et ne l’oublie jamais ! Comme nous Épicharis, il est sensible ; comme nous, il sait que la séparation est le plus grand des maux. Il veut aller en prison et à la guillotine avec sa maîtresse. Épicharis, peut-on lui refuser ce bienfait ?