Page:Anatole France - Balthasar.djvu/100

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manier l’aiguille, la navette et le fuseau, et travaillaient à l’envi au trousseau de l’enfant attendu. Læta, allongeant le bras, prit le petit bonnet qu’une vieille esclave noire lui présentait en riant. Elle en coiffa son poing fermé et rit à son tour. C’était un petit bonnet de pourpre, d’or, d’argent et de perles, magnifique comme les rêves d’une pauvre Africaine.

En ce moment une femme étrangère parut dans cette cour intérieure. Elle était vêtue d’une robe d’une seule pièce, semblable par sa couleur à la poussière des chemins. Ses longs cheveux étaient couverts de cendre, mais son visage, brûlé par les larmes, rayonnait encore de gloire et de beauté.

Les esclaves, la prenant pour une mendiante, se levaient déjà pour la chasser, quand Læta Acilia, la reconnaissant du premier coup d’œil, se leva et courut à elle en s’écriant :

— Marie, Marie, il est vrai que tu fus la préférée d’un dieu. Celui que tu aimas sur la terre t’a entendue dans son ciel et il m’a accordé ce que j’avais demandé par ton entremise. Vois ! ajouta-t-elle.

Et elle montra le petit bonnet qu’elle tenait encore dans sa main.