Page:Anatole France - Balthasar.djvu/200

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À ces mots, le roi Loc tourna la tête, mais non pas assez vite pour qu’Abeille ne vît pas une larme arrêtée dans les cils du Nain. Alors Abeille eut regret de lui avoir fait de la peine.

— Petit roi Loc, lui dit-elle, je t’aime comme un petit roi Loc que tu es ; et si tu me fais rire comme faisait Francœur, il n’y a rien là pour te déplaire, car Francœur chantait bien, et il aurait été beau sans ses cheveux gris et son nez rouge.

Le roi Loc lui répondit :

— Abeille des Clarides, princesse des Nains, je vous aime dans l’espoir que vous m’aimerez un jour. Mais je n’aurais pas cet espoir que je vous aimerais tout autant. Je ne vous demande, en retour de mon amitié, que d’être toujours sincère avec moi.

— Petit roi Loc, je te le promets.

— Eh bien ! Abeille, dites-moi si vous aimez quelqu’un jusqu’à l’épouser.

— Petit roi Loc, je n’aime personne jusque-là.

Alors le roi Loc sourit et, saisissant sa coupe d’or, il porta d’une voix retentissante la santé de la princesse des Nains. Et une rumeur immense s’éleva de toutes les profondeurs de la terre, car la table du festin allait d’un bout à l’autre de l’empire des Nains.