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Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre, 1879.djvu/11

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Les deux vieillards se couchèrent, selon leur coutume, dans la salle basse, sous la courtine de colonnade tendue à la poutrelle de l’escalier. La bonne de madame Trévière monta avec inquiétude, par une roide échelle, dans le grenier, où elle coucha parmi les oignons.

On avait réservé à la Parisienne et au petit la chambre d’honneur, où était le lit nuptial, dans lequel les bonnes gens n’avaient couché qu’une fois, et l’armoire de chêne, bourrée de linge, fermée à clef. La couchette qui avait autrefois servi à l’enfant de la maison avait été tirée du grenier pour le petit-fils. On l’avait dressée dans le coin le plus abrité, sous une tablette chargée de pots de confitures. Madame Trévière, en femme ordonnée, fit pour se reconnaître trente-six petits tours sur le plancher de sapin qui craquait. Mais elle eut la déception de ne découvrir aucun porte-manteau. Le plafond à poutres saillantes et les murs étaient blanchis à la chaux. Madame Trévière remarqua peu les images coloriées qui égayaient cette belle chambre ; pourtant, elle vit au-dessus du lit nuptial une gravure représentant des enfants en veste noire et en pantalon blanc, un brassard au coude, un cierge à la main, défilant dans une église gothique. Elle lut au-dessous cette formule gravée, avec les noms, date et signature remplis à la main : Je soussigné certifie que Pierre-Agénor Trévière a fait sa