Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre, 1879.djvu/42

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une trouvaille. Haviland n’est pas, à proprement parler, un jeune homme. Tu vois, fillette, que je suis juste. Mais c’est un gentleman, un vrai gentleman. Il est très riche.

Ayant la bouche pleine de ce dernier mot, il frappait la poche de son habit, dans laquelle était le papier que l’Anglais lui avait remis. Il poursuivit en s’échauffant :

— Ce diable d’Haviland est à la tête d’une fortune magnifique. Des immeubles, des bois, des fermes, des valeurs en portefeuille ! tout ! C’est superbe !

Elle fit une grimace de dégoût et haussa les épaules. Il sentit qu’il était brutal. Il reprit :

— Ne crois pas, fillette, que je veuille te voir faire ce qu’on appelle un mariage d’argent. Non ! Je t’aime et je veux ton bonheur !

Il aimait véritablement sa fille, et son amour paternel lui mit de l’attendrissement dans la voix. Il reprit :

— Dieu m’est témoin que je ne veux que ton bonheur. Je sais ce que c’est que le sentiment, et, quand j’ai épousé ta mère, je n’ai pas regardé au magot. Veux-tu que je te dise ? Moi, je suis