Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/272

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tuition que cette lettre était écrite par une femme exquise et désolée, d’une nature et d’une condition rares. Par une suite d’inductions dont les lobes cérébraux d’un métaphysicien étaient seuls capables, le moraliste se démontra jusqu’à la plus limpide évidence que cette femme était une princesse danoise, qu’elle se nommait Vranga et qu’ayant revêtu des parures d’une poésie étrange et mélancolique pour se rendre à la fontaine des quatre évêques, elle était tombée morte dans son boudoir au milieu des plantes tropicales, dont le parfum, symbole de son amour pour Branchut, était délicieux et mortel.

À mesure que ces faits élégants et tristes lui apparaissaient par suite d’un examen subjectif et d’une enquête intérieure, le moraliste en faisait part à son ami Labanne, qui n’y trouvait rien d’extraordinaire.

Les découvertes successives que faisait Branchut au sujet de la princesse Vranga eurent pour effet de le plonger dans une tristesse éloquente.

— Je dois expier, disait-il, par des tortures choisies, l’incomparable crime d’avoir causé la