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Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/310

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M. Sarriette cessa de mesurer la falaise avec son parapluie et salua.

Le soir, sous l’innombrable armée des étoiles, M. Alidor Sainte-Lucie, paré de toutes ses grâces créoles, offrait le bras à madame Lourmel pour faire un tour de promenade sur la plage.

Remi marchait à côté de Jeanne et regardait les ombres bleues de la nuit descendre des cils de la jeune fille sur ses joues rondes. Elle tourna vers le jeune homme ses yeux frais comme des violettes trempées de rosée, et, laissant voir ses dents sur lesquelles descendait un rayon de lune, elle dit :

— Maman ne comprenait pas du tout, mais pas du tout pourquoi vous étiez parti en voyage en même temps que nous, sans chapeau, avec des pantoufles et un veston. Mais moi j’ai bien compris que c’était parce que vous vouliez m’épouser.

M. Alidor, resté seul avec son fils, lui dit d’un ton moitié tendre, moitié bourru :

— Elle est très bien, cette jeune fille. Tu n’en méritais pas une pareille. J’ai eu bien tort de ne pas raconter à madame Lourmel la vie que tu as