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Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/96

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ments sinistres, et le contraste était si brusque qu’on ne pouvait concevoir de telles alternatives de tendresse triste et d’ironie furieuse, même dans un cerveau déjà décomposé. Et l’horreur d’une telle scène se décuplait en passant par l’imagination blessée d’Hélène. Elle sentait comme des fils de métal rougis au feu lui courir de la nuque au talon ; une cuirasse ardente lui cernait le ventre et les flancs.

Et elle écoutait la voix de son mari avec une attention lucide. Sa torture augmentait de n’y pouvoir découvrir même le sens le plus vague. En cet instant, si elle avait entendu cet homme la dénoncer clairement de la langue et du doigt et la maudire, en vérité elle se serait sentie soulagée.

À dix heures du soir, les docteurs Hersent, Guérard et Baldec se réunirent autour du malade qui, pris devant eux d’un tremblement de tous ses membres, s’assoupit.

Il avait l’air de dormir. Et un nouveau supplice, le plus affreux de tous, commença pour Hélène. Elle se sentit reprise d’amitié et de respect pour cet homme loyal qui l’avait aimée. Elle