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mémoires d’un volontaire

à propos au Père Féval que Virgile était plus digne encore que son antique précurseur de célébrer la beauté de ces frais ombrages, frigus opacum. Mon régent parut assez satisfait de ce compliment. Il m’interrogea avec bonté sur quelques points du rudiment. Puis, ayant entendu mes réponses :

— C’est bien, me dit-il ; avec du travail, beaucoup de travail, vous pourrez suivre la classe de quatrième. Venez, je veux vous présenter moi-même à votre professeur et à vos condisciples.

Pendant le temps qu’avait duré notre promenade, je me sentais recueilli dans mon abandon et soutenu dans ma détresse. Mais quand je me vis au milieu des collégiens de ma classe, en présence de M. Joursanvault mon professeur, je retombai dans un profond désespoir. M. Joursanvault n’avait ni l’abord facile, ni la belle simplicité du régent. Il me sembla beaucoup plus pénétré de son importance et aussi plus dur et plus fermé. C’était un petit homme à grosse tête dont les paroles passaient en sifflant entre deux lèvres blanches et quatre dents jaunes. Je songeai tout de suite