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l’étui de nacre

de la lâcheté, c’est à cet excellent homme que je le dois.

M. Féval n’était pas un prêtre philosophe, il professait les vertus et non la foi du vicaire savoyard. Il croyait tout ce qu’un prêtre doit croire. Mais il avait horreur des momeries et il ne pouvait tolérer qu’on intéressât Dieu à des bagatelles. Il y parut bien en ce jour de Noël, où M. Joursanvault vint lui dénoncer les impies qui, la veille, avaient mis de l’encre dans les bénitiers.

Le scandalisé Joursanvault mâchait des exorcismes et murmurait :

— Certes, le trait est noir !

— À cause de l’encre, répondit paisiblement notre régent.

Cet homme vertueux considérait la faiblesse comme le principe unique de tous les maux. Il disait souvent : « Lucifer et les anges rebelles ont failli par orgueil. C’est pourquoi ils restent jusque dans l’enfer princes et rois et exercent sur les damnés une terrible souveraineté. S’ils avaient péri lâchement, ils seraient au milieu des flammes la risée et le jouet des âmes des pécheurs, et l’hégémonie