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l’étui de nacre

Je l’assurai que le duc vivait à Londres, en donnant des leçons d’écriture. En effet, le duc m’avait fait tenir récemment un papier où il me mandait qu’il vivait parfaitement heureux à Londres avec quatre shillings six pence par jour.

— Il se peut, me répondit M. Larisse, mais on n’est pas coiffé à Londres comme à Paris. Les Anglais savent faire des constitutions, mais ils ne savent pas faire de perruques, et leur poudre n’est pas d’un blanc assez pur.

M. Larisse m’eut vite rasé. Je n’avais pas alors la barbe bien rude. À peine avait-il fermé son rasoir que, lui saisissant le poignet, je lui dis résolument :

— Mon cher monsieur Larisse, vous êtes un galant homme : vous allez m’accompagner à l’assemblée générale de la section des Postes, en la ci-devant église Saint-Eustache. Vous y attesterez avec moi que M. Eustance n’a jamais émigré.

À ces mots, M. Larisse pâlit et murmura d’une voix mourante :

— Mais je ne connais pas M. Eustance.

— Moi non plus, lui répondis-je.

Ce qui était la pure vérité. J’avais bien au-