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Page:Anatole France - L’Île des Pingouins.djvu/30

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de granit, il remonta la rivière d’Auray. Et après trois heures de navigation il mit pied à terre devant une maison romaine. Du toit s’élevait une fumée légère. Le saint homme franchit le seuil sur lequel une mosaïque représentait un chien, les jarrets tendus et les babines retroussées. Il fut accueilli par deux vieux époux, Marcus Combabus et Valeria Moerens, qui vivaient là du produit de leurs terres. Autour de la cour intérieure régnait un portique dont les colonnes étaient peintes en rouge depuis la base jusqu’à mi-hauteur. Une fontaine de coquillages s’adossait au mur et sous le portique s’élevait un autel, avec une niche où le maître de cette maison avait déposé de petites idoles de terre cuite, blanchies au lait de chaux. Les unes représentaient des enfants ailés, les autres Apollon ou Mercure, et plusieurs étaient en forme d’une femme nue qui se tordait les cheveux. Mais le saint homme Maël, observant ces figures, découvrit parmi elles l’image d’une jeune mère tenant un enfant sur ses genoux.

Aussitôt il dit, montrant cette image :

— Celle-ci est la Vierge, mère de Dieu. Le poète Virgile l’annonça en carmes sibyllins avant qu’elle ne fût née, et, d’une voix angélique, il chanta Jam redit et virgo. Et l’on fit d’elle dans la gentilité des figures prophétiques telles que celle-ci, que tu as placée, ô Marcus, sur cet autel. Et sans doute elle a protégé tes lares