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cocotte. » Je lui dis : « Je ne veux pas te retarder, mon ami. Encore faut-il que tu me dises tes péchés. Quels sont tes péchés ? » Il me regarde étonné et me répond : « Mais tous ! » « Comment tous ? » « Oui, tous. J’ai fait tous les péchés. » Je secoue la tête : « Tous, mon ami, c’est beaucoup !… Dis-moi, as-tu battu ta mère ? » À cette question, mon cavalier s’agite, lève de grands bras, jure comme un païen et s’écrie : « Monsieur le curé, vous vous f… de moi ! » Je lui réponds : « Calme-toi, mon ami. Tu vois bien que tu n’as pas commis tous les péchés… »

Ainsi l’aumônier gaîment contait des historiettes pieuses de régiment. Et il y mettait ensuite la morale. Les bons chrétiens faisaient les bons soldats. C’était une faute que de bannir la religion de l’armée.

Le général Cartier de Chalmot approuva ces maximes.

— Je l’ai toujours dit, mon cher abbé. En détruisant les croyances spiritualistes,