Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/109

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est absurde de concevoir un être qui n’est pas fini dans l’espace ni le temps. Je le crois borné et même très borné. Je ne crois plus qu’il soit le Dieu unique ; pendant fort longtemps, il ne le crut pas lui-même : il fut d’abord polythéiste. Plus tard, son orgueil et les flatteries de ses adorateurs le rendirent monothéiste. Il a peu de suite dans les idées ; il est moins puissant qu’on ne pense. Et, pour tout dire, c’est moins un dieu qu’un démiurge ignorant et vain. Ceux qui, comme moi, connaissent sa véritable nature l’appellent Ialdabaoth.

— Comment dites-vous ?

— Ialdabaoth.

— Qu’est-ce que c’est que ça, Ialdabaoth ?

— Je vous l’ai dit : c’est le démiurge que, dans votre aveuglement, vous adorez comme le dieu unique.

— Vous êtes fou. Je ne vous conseille pas de conter de pareilles bourdes à l’abbé Patouille.

— Je n’espère point, cher Maurice, percer les ténèbres épaisses de votre intelligence. Sachez seulement que je vais combattre Ialdabaoth avec l’espoir de le vaincre.