Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/153

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Ayant cessé d’être invisible, il ne pouvait plus s’introduire dans la bibliothèque d’Esparvieu et n’étanchait plus à cette source inépuisable son ardente soif d’apprendre. Il allait lire le soir à la bibliothèque Sainte-Geneviève, sur la montagne illustre des études ; mais il n’y recevait que des livres peu rares, crasseux, couverts d’annotations ridicules, et dont beaucoup de pages avaient été arrachées.

La vue des femmes le troublait, et il lui souvenait de madame des Aubels dont les genoux polis brillaient dans le lit défait. Et quoiqu’il fût beau, il n’était pas aimé parce qu’il était pauvre et portait des vêtements de travail. Il fréquentait Zita et prenait quelque plaisir à se promener avec elle le dimanche sur les routes poudreuses qui longent les fossés pleins d’herbes grasses des fortifications. Ils allaient tous deux le long des guinguettes, des jardins maraîchers, des tonnelles, exposant, discutant les plus vastes desseins qui aient jamais été agités sur cette terre ; et parfois, aux abords d’une fête foraine, l’orchestre des chevaux de bois accompagnait leurs paroles, qui menaçaient les cieux.