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Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/166

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pour pénétrer jusque dans son âme. Il vous a abusé, Maurice, par de grossiers artifices.

Maurice soutint qu’il n’était pas du tout victime d’une hallucination, qu’il n’avait pas rêvé, qu’il avait vu de ses yeux, entendu de ses oreilles son ange gardien. Il insista :

— Monsieur l’abbé, une dame, qui se trouvait alors près de moi, et qu’il est inutile de nommer, l’a également vu et entendu. Et, de plus, elle a senti les doigts de l’ange qui se… qui s’égaraient sous… Enfin, elle les a sentis… Croyez-moi, monsieur l’abbé, rien n’est plus vrai, rien n’est plus réel, rien n’est plus sûr que cette apparition. L’ange était blond, jeune, très beau. Sa peau claire paraissait dans l’ombre comme baignée d’une lumière laiteuse. Il parlait d’une voix douce et pure.

L’abbé interrompit vivement :

— Cela seul, mon enfant, prouverait que vous avez rêvé. De l’avis de tous les démonologues, les mauvais anges ont la voix rauque et qui grince comme une serrure rouillée ; et alors même qu’ils réussissent à donner à leur visage quelque apparence de beauté, ils ne parviennent pas à imiter la voix pure des bons