Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/198

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— Nos points de vue diffèrent, dit Arcade avec douceur ; je pense, comme le prince Istar, que tout est à changer en ce pays. Mais à quoi bon disputer ? Et il est trop tard. Nous venons vous parler, ô mon frère Sophar, au nom de cinq cent mille esprits célestes résolus à commencer demain la révolution universelle.

Le baron Everdingen s’écria que c’étaient des écervelés, qu’il ne donnerait pas un sou, qu’il était criminel et fou de s’attaquer à la plus admirable chose du monde, à la chose qui rendait la terre plus belle que le ciel : la finance.

Il était poète et prophète : son cœur frissonna d’un saint enthousiasme ; il montra l’Épargne française, la vertueuse Épargne, l’Épargne chaste et pure, semblable à la vierge du Cantique, venant du fond des campagnes, en jupe villageoise, porter au fiancé qui l’attend, robuste et splendide, au Crédit, le trésor de son amour. Et il fit voir le Crédit, riche des dons de son épouse, versant sur tous les peuples de l’univers des torrents d’or, qui d’eux-mêmes, par mille filets invisibles, reviennent plus abondants sur le sol béni dont ils avaient jailli.

— Par l’Épargne et le Crédit, la France est