Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/263

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romantisme. La guerre et le romantisme, fléaux effroyables ! Et quelle pitié de voir ces gens-ci nourrir un amour enfantin et furieux pour les fusils et les tambours ! Ils ne comprennent pas que la guerre, qui forma les cœurs et fonda les cités des hommes ignorants et barbares, n’apporte au vainqueur lui-même que ruine et misère et n’est plus qu’un crime horrible et stupide maintenant que les peuples sont liés entre eux par la communauté des arts, des sciences et du trafic. Européens insensés qui méditent de s’entr’égorger, alors qu’une même civilisation les enveloppe et les unit !

» Je renonçai à converser avec ces fous ; je me retirai dans ce village où je me fis jardinier. Les pêches de mon verger me rappellent la peau ensoleillée des Ménades. J’ai gardé pour les hommes mon antique amitié, un peu d’admiration et beaucoup de pitié, et j’attends, en cultivant cet enclos, le jour encore lointain où le grand Dionysos viendra, suivi de ses faunes et de ses bacchantes, rapprendre à la terre la joie et la beauté, et ramener l’âge d’or. Je marcherai