Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/339

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Il parlait ainsi pour cacher sa douleur, car il aimait Gilberte plus que jamais, et la trahison de cette créature le faisait beaucoup souffrir. Il poursuivit :

— J’allais vous demander de m’en débarrasser. Mais vous avez suivi votre sale naturel ; vous vous êtes conduit comme un cochon.

À ce moment solennel, Arcade aurait prononcé un mot sorti du cœur que le jeune Maurice, éclatant en sanglots, aurait pardonné à son ami et à sa maîtresse, et tous trois fussent redevenus contents, heureux. Mais Arcade n’était point nourri du lait de la tendresse humaine. Il n’avait point souffert et ne savait point compatir aux souffrances. Il répondit avec une froide sagesse :

— Mon cher Maurice, la nécessité, qui conduit et enchaîne les actions des êtres animés, produit des effets souvent imprévus, parfois absurdes. C’est ainsi que j’ai été amené à vous déplaire. Vous ne m’en feriez nul reproche si vous aviez une bonne philosophie de la nature ; vous sauriez alors que la volonté n’est qu’une illusion et que les affinités physiologiques sont aussi exactement déterminées que les combi-