Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/392

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— Tu vois, Arcade, s’écria-t-il, d’un air de triomphe, tu vois : je ne suis pas un assassin. Je suis innocent. Je n’aurais jamais imaginé à quel point il est agréable d’être innocent.

Puis il songea et, par un phénomène ordinaire, la réflexion dissipa son allégresse.

— Je suis innocent. Mais il n’y a pas à se le dissimuler, dit-il en secouant la tête, je fais partie d’une bande de malfaiteurs ; je vis avec des bandits. Tu t’y trouves à ta place. Arcade, toi qui es un individu équivoque, cruel et pervers. Mais moi, qui suis de bonne famille et qui ai reçu une excellente éducation, j’en rougis.

— Moi aussi, dit Arcade, j’ai reçu une excellente éducation.

— Où ça ?

— Au ciel.

— Non, Arcade, non ; tu n’as pas reçu d’éducation. Si l’on t’avait inculqué des principes, tu les aurais encore. Les principes ne se perdent jamais. J’ai appris dans mon enfance le respect de la famille, de la patrie et de la religion. Je ne l’ai pas oublié, je ne l’oublierai jamais. Sais-tu ce qui me choque le plus en