Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/182

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— Hélas ! non, répondis-je, mon père est adonné à quelque art mécanique et à une sorte de négoce.

— Est-il seulement dans les partis, a-t-il une charge de finance ? Non ? C’est dommage. Il faut donc vous aimer pour vous-même. Mais dites-moi la vérité : M. d’Astarac ne viendra-t-il pas bientôt ?

À ce nom, à cette demande, un doute horrible traversa mon esprit. Je soupçonnai cette ravissante Jahel de m’avoir été envoyée par le cabbaliste pour jouer avec moi le rôle de Salamandre. Je l’accusai même intérieurement d’être la nymphe de ce vieux fou. Pour en être tout de suite éclairé, je lui demandai rudement si elle avait coutume de faire la Salamandre dans ce château.

— Je ne vous entends point, me répondit-elle, en me regardant avec des yeux pleins d’une innocente surprise. Vous parlez comme M. d’Astarac lui-même, et je vous croirais atteint de sa manie, si je n’avais pas éprouvé que vous ne partagez point l’aversion que les femmes lui donnent. Il ne peut en souffrir une, et c’est pour moi une véritable gêne de le voir et de lui parler. Pourtant, je le cherchais tout à l’heure quand je vous ai trouvé.