Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/324

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle était en chemise et cette clarté de la lune s’égouttait comme du lait sur ses épaules nues. Elle se coula à mon côté, m’appela des noms les plus tendres et des noms les plus effroyablement grossiers qui glissaient sur ses lèvres en suaves murmures. Puis elle se tut et commença à me donner ces baisers qu’elle savait et auprès desquels tous les embrassements des autres femmes semblent insipides.

La contrainte et le silence augmentaient la tension furieuse de mes nerfs. La surprise, la joie d’une revanche et, peut-être, une jalousie perverse, attisaient mes désirs. L’élastique fermeté de sa chair et la souple violence des mouvements dont elle m’enveloppait, demandaient, promettaient et méritaient les plus ardentes caresses. Nous connûmes, cette nuit-là, les voluptés dont l’abîme confine à la douleur.

En descendant, le matin, dans la cour de l’hôtellerie, j’y trouvai M. d’Anquetil qui me parut moins odieux, maintenant que je le trompais. De son côté, il semblait plus attiré vers moi qu’il ne l’avait été depuis le commencement du voyage. Il me parla avec familiarité, sympathie, confiance, me reprochant seulement de montrer à Jahel peu d’égards et d’empressement, et de ne pas lui rendre ces