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Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/342

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— Ah ! monsieur, m’écriai-je, qu’importe que ce soit le juif ou les Elfes ; il faut le secourir.

— Mon fils, il importe beaucoup, au contraire, répliqua M. d’Astarac. Car, s’il avait été frappé d’une main humaine, il me serait facile de le guérir par opération magique, tandis que, s’étant attiré l’inimitié des Elfes, il ne saurait échapper à leur vengeance infaillible.

Comme il achevait ces mots, M. d’Anquetil et Jahel, attirés par mes cris, approchaient avec le postillon qui portait une lanterne.

— Quoi, dit Jahel, M. Coignard se trouve mal ?

Et, s’étant agenouillée près de mon bon maître, elle lui souleva la tête et lui fit respirer des sels.

— Mademoiselle, lui dis-je, vous avez causé sa perte. Sa mort est la vengeance de votre enlèvement. C’est Mosaïde qui l’a tué.

Elle leva de dessus mon bon maître son visage pâle d’horreur et brillant de larmes.

— Croyez-vous aussi, me dit-elle, qu’il soit si facile d’être jolie fille sans causer de malheurs ?

— Hélas ! répondis-je, ce que vous dites là n’est que trop vrai. Mais nous avons perdu le meilleur des hommes.