Mon bon maître écoutait ces paroles, replié sur lui-même et la tête tristement baissée. Il semblait méditer les changements qu’apporterait un jour à sa personne la nourriture imaginée par notre hôte.
— Monsieur, dit-il enfin, ne parlâtes-vous pas hier à la rôtisserie d’un certain élixir qui dispense de toute autre nourriture ?
— Il est vrai, dit M. d’Astarac, mais cette liqueur n’est bonne que pour les philosophes ; et vous concevez par là combien l’usage s’en trouve restreint. Il vaut mieux n’en point parler.
Cependant, un doute me tourmentait ; je demandai à mon hôte la permission de le lui soumettre, certain qu’il l’éclaircirait tout de suite. Il me permit de parler, et je lui dis :
— Monsieur, ces Salamandres, que vous dites si belles et dont je me fais, sur votre rapport, une si charmante idée, ont-elles malheureusement gâté leurs dents à boire de la lumière, comme les paysans du Valais ont perdu les leurs en ne mangeant que du laitage ? Je vous avoue que j’en suis inquiet.
— Mon fils, répondit M. d’Astarac, votre curiosité me plaît et je veux la satisfaire. Les Salamandres n’ont point de dents, à proprement