Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/108

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mauvais. Mais son antipathie pour ce goût était bien vive, à en juger par la manière dont il tournait ma copie du doigt avec un ricanement sinistre. Je souffrais de ces dédains. Je sentais bien qu’il fallait renoncer pour toujours à la gloire, heureux encore si je pouvais me réfugier dans une obscure médiocrité !

Une circonstance à cet égard me rassurait en quelque manière. Je ne descendais jamais aux trois dernières places. Ce n’était pas possible. Ce rang était à jamais assuré à Morlot, Laboriette et Chazal. Quelle que fût l’épreuve, en quelque matière qu’il fallût composer, sciences ou lettres, langues vivantes ou classiques, Morlot, Laboriette et Chazal étaient toujours les derniers. Le phénomène se reproduisait chaque semaine, avec la constance de ces lois, qui règlent le mouvement des astres, et le retour des saisons. Il y avait des variations sur le pénultième qui était tantôt Laboriette et tantôt Morlot. Quant au dernier, c’était Chazal invariablement et l’on admirait l’inébranlable fermeté avec laquelle il se maintenait à la dernière place. M. Beaussier ne faisait aucune objection à un fait d’une exactitude si satisfaisante et si nécessaire. Il s’incli-