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XXIII

DIVAGATIONS

Un jour, dans ma chambre, je lisais Virgile. Je l’avais aimé dès le collège ; mais, depuis que les professeurs ne me l’expliquaient plus, j’en avais une meilleure intelligence et rien ne m’en gâtait plus la beauté. Je lisais la VIe Églogue avec enchantement. Ma laide petite chambre s’était effacée ; j’étais dans la grotte où Silène endormi laissa tomber sa couronne. Auprès du jeune Chromis, du jeune Mnasyle et d’Églé, la plus belle des naïades, j’écoutais le vieillard, barbouillé du sang des mûres, dont les chants faisaient bondir en cadence les faunes et les bêtes sauvages et instruisaient les chênes à balancer leur cime altière. Il disait comment,