Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/44

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supérieur ; mais je suis royaliste, et la première raison d’être d’un roi, je dirai même son unique raison d’être, c’est de garantir la liberté des peuples. Une royauté oppressive est un non-sens.

À quoi mon parrain répondait :

— Malheureusement, le souverain, d’ordinaire, retire au peuple les libertés nécessaires pour lui garantir les autres.

— C’est ce qui arrive quand le peuple est souverain.

— Faut-il qu’un homme possède notre bien pour nous le garder, et ne pouvons-nous le garder nous-mêmes ?

— En possédant tout, le roi, qui n’est qu’un homme, ne possède rien que par fiction et le peuple jouit de tout. Au contraire, dans une démocratie, les partis qui gouvernent et forment une multitude possèdent réellement le bien commun : ils frustrent le peuple qui ne jouit de rien.

— La liberté est le plus précieux des biens.

— À condition de le perdre. On aliène sa liberté chaque fois qu’on en use.

— Un républicain n’en aliène jamais le principe. Voilà la différence !