Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/95

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que je verrais le jour où les routes de l’air seraient fréquentées par d’innombrables voyageurs.

— Alors, disait-il, il n’y aura plus de frontières. Tous les peuples ne formeront qu’un peuple. La paix régnera sur le monde.

M. Joseph Vernier devait faire sa conférence dans une des salles d’une vaste usine de Grenelle. On y pénétrait par un hangar où l’on voyait le ballon qu’avait monté le jeune aéronaute, en une ascension terrible. Il gisait là, dégonflé, semblable au corps sans vie d’un monstre fabuleux, et la grande blessure, dont il était déchiré, attirait les regards. Près du ballon, on remarquait l’hélice qui avait, disait-on, pendant quelques instants, imprimé une direction à l’aérostat. Introduits dans la salle voisine, nous vîmes plusieurs rangées de chaises déjà occupées par une assistance où brillaient des chapeaux de femmes et d’où montait un bourdonnement de voix. À une extrémité de la salle, s’élevait une estrade portant une table et des fauteuils vides qui faisaient face aux chaises. Je regardais avidement. Après une attente d’une dizaine de minutes, nous vîmes le jeune aéronaute monter