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NOTE

« À côté du vers parnassien qui, avec Leconte de Lisle, Catulle Mendès, de Heredia, Silvestre, est resté presque classique, n’est-il pas permis de chercher un vers plus libre, plus élastique, plus vivant ? Ce qui m’a fait, en somme, prendre la défense de la jeune école, c’est ce bizarre et peu généreux parti pris que leurs prédécesseurs ont mis à les combattre.

« Tout ce que les Parnassiens reprochent, en somme, aux Symbolistes leur avait été reproché, à eux, Parnassiens, dans le temps où ils luttaient eux-mêmes ; je parle pour de Heredia, surtout, et Leconte de Lisle, car Mendès, quoique aussi métaphysique qu’eux, à l’esprit plus ingénieux, plus ouvert, et moins sectaire.

« Mais ils me font l’effet de ces vieillards qui trouvent que les femmes ont cessé d’être jolies précisément depuis qu’eux-mêmes ont cessé d’être jeunes, et qui conservent tous leurs trésors d’adorations et d’hommages pour les jeunes filles de leur temps. C’est très humain, mais c’est peu raisonnable… »

De son côté, Leconte de Lisle lorsqu’il fut interviewé à son tour, prit Anatole France à partie, en termes fort vifs :

— « Il y a un homme dont je ne vous parlerai pas. à qui j’ai donné dans le temps, de toutes les façons, des preuves d’amitié, mais qui, depuis, m’a odieusement offensé. C’est M. Anatole France. Je reconnais son talent qui est délicat et subtil, mais j’estime peu son caractère. Il a inventé le Symbolisme, sans y croire, dans l’espoir de jouer un vilain tour à son ami de Heredia et à moi, et vraiment il y a peu réussi… Il en sera pour sa courte honte. »

L’Écho de Paris ayant publié cette déclaration, le