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LES DÉBUTS DE VICTORIEN SARDOU

connaît cent autres. Si j’étais ministre de l’Instruction publique, je ferais expliquer dans toutes les écoles le plan de Pont-Arcy. M. Sardou n’eût-il fait que le plan de Pont-Arcy, je le tiendrais pour un véritable philosophe. Je ne sais ce qu’il pense de la vie, mais il serait bien ingrat de ne pas l’aimer un peu ; non pas pour les triomphes qu’elle lui apporte : la gloire n’est jamais douce. Mais la vie lui donne toutes sortes de spectacles et d’amusements, elle lui fournit des figures et des scènes à l’infini. Enfin, elle le distrait le plus joliment du monde. Sa conversation est pleine de ces richesses qu’il a dû sentir avant de les faire goûter aux autres. Son esprit est orné comme un musée et animé comme un caravansérail. Certes, M. Victorien Sardou n’est pas à plaindre si, comme jadis La Fontaine, il vit « pour que cela l’amuse ».

27 novembre 1887.