Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/177

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Elle n’acheva pas et ses regards s’élevèrent au plafond. Les miens les y suivirent et rencontrèrent une petite spirale en dentelle de papier, qui, suspendue à la place d’un lustre, était destinée, selon mes conjectures, à attirer les mouches et à les détourner, par conséquent, des cadres dorés des glaces et du tableau d’honneur.

— J’ai rencontré, dis-je, mademoiselle Alexandre chez madame de Gabry et j’ai pu apprécier l’excellent caractère et la vive intelligence de cette jeune fille. Ayant beaucoup connu ses parents, je me sens enclin à reporter sur elle l’intérêt qu’ils m’inspiraient.

Pour toute réponse, mademoiselle Préfère soupira profondément, pressa sur son cœur sa mystérieuse pèlerine et contempla de nouveau la petite spirale de papier.

Enfin elle me dit :

— Puisque vous avez été, monsieur, l’ami de M. et de Madame Alexandre, j’aime à croire que vous avez déploré, comme M. Mouche et comme moi, les folles spéculations qui les ont conduits à la ruine et ont réduit leur fille à la misère.

Je songeai, en entendant ces paroles, que c’est un grand tort que d’être malheureux et que ce tort