Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mais elle s’en avisa tout à coup, rougit, balbutia ; et je dus renoncer à connaître le programme complet des études de l’institution Préfère.

Ayant interrogé Jeanne sur divers points et obtenu les réponses les plus confuses, je vis que la corde occupait cette jeune âme tout entière et j’entrai bravement dans ce grave sujet.

— Vous sautez à la corde, lui dis-je. C’est un agréable exercice dont il ne faut pas abuser ; car un excès de ce genre pourrait nuire gravement à votre santé et je ne m’en consolerais pas, Jeanne ; je ne m’en consolerais pas.

— Vous êtes bien bon, monsieur, me répondit la jeune fille, d’être venu me voir et de me parler, comme vous me parlez. Je n’ai pas pensé à vous remercier quand je suis entrée parce que j’étais trop surprise. Avez-vous vu madame de Gabry ? Parlez-moi d’elle, voulez-vous, monsieur ?

— Madame de Gabry, répondis-je, va bien. Je vous dirais d’elle, Jeanne, ce qu’un vieux jardinier disait de la châtelaine sa maîtresse quand on s’inquiétait d’elle à lui : « Madame est dans son chemin. » Oui, madame de Gabry est dans son chemin ; vous savez, Jeanne, comme ce chemin est bon et de quel pas égal elle y marche. Je suis