Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/214

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Elle me dit en souriant :

— Je sais bien que c’est à vous que je dois tout cela.

Je lui parlai d’autre chose, mais je remarquai qu’elle ne m’écoutait pas aussi bien qu’elle aurait voulu.

— Je vois que quelque idée vous occupe, lui dis-je ; parlez-moi de cela, ou nous ne dirons rien qui vaille, ce qui ne sera digne ni de vous ni de moi.

Elle me répondit :

— Oh ! je vous écoutais bien, monsieur ; mais il est vrai que je pensais à quelque chose. Vous me pardonnerez, n’est-ce pas ? Je pensais qu’il faut que mademoiselle Préfère vous aime beaucoup pour être devenue tout d’un coup si bonne avec moi.

Et elle me regarda d’un air à la fois souriant et effaré qui me fit rire.

— Cela vous étonne ? dis-je.

— Beaucoup, me répondit-elle.

— Pourquoi, s’il vous plait ?

— Parce que je ne vois pas du tout, du tout, mais là !… pas du tout de raisons pour que vous plaisiez à mademoiselle Préfère.