Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/268

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souvenir d’un plat coquin ? Il donne raison à mademoiselle Préfère dont il a depuis longtemps apprécié l’esprit et le caractère. Il n’a pas à se prononcer sur le fond du débat, mais il doit me dire que les apparences ne me sont pas favorables. Cela me touche peu. Il ajoute — et cela me touche davantage — que la faible somme qu’il avait entre les mains pour l’éducation de sa pupille est épuisée et qu’en cette circonstance, il admire vivement le désintéressement de mademoiselle Préfère qui consent à garder près d’elle mademoiselle Jeanne.

Une magnifique lumière, la lumière d’un beau jour verse ses ondes incorruptibles dans ce lieu sordide et éclaire cet homme. Au dehors, elle répand sa splendeur sur toutes les misères d’un quartier populeux.

Qu’elle est douce, cette lumière dont mes yeux s’emplissent depuis si longtemps, et dont je ne jouirai bientôt plus ! Je m’en vais, songeur, les mains derrière le dos, le long des fortifications, et je me trouve, sans savoir comment, dans des faubourgs perdus, plantés de maigres jardins. Sur le bord d’un chemin poudreux, je rencontre une plante dont la fleur à la fois éclatante et