Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/280

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reprendra plus. J’en fais un grand serment. Et pourquoi n’irions-nous pas en Océanie ? Le climat y est sain et je voyais l’autre jour dans un journal qu’on y a des pianos. En attendant allons chez madame de Gabry qui, par bonheur, est à Paris depuis trois ou quatre jours ; car nous sommes deux innocents et nous avons grand besoin d’aide.

Tandis que je parlais, les traits de Jeanne pâlissaient et s’effaçaient ; un voile était sur ses regards, un pli douloureux contracta ses lèvres entr’ouvertes. Elle laissa tomber sa tête sur son épaule et resta sans connaissance.

Je la pris dans mes bras et la montai dans l’escalier de madame de Gabry comme un petit enfant endormi. Je tombais moi-même, abîmé de fatigue et d’émotion quand elle se ranima.

— C’est vous, me dit-elle ! Tant mieux !

Nous sonnâmes en cet état à la porte de notre amie.


Même jour.

Il était huit heures. Madame de Gabry fut