Page:Anatole France - Le Génie latin.djvu/102

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À cette époque, le cours de philosophie était de deux ans, après quoi l’étudiant soutenait une thèse latine. Mais cette cérémonie entraînait à d’assez grandes dépenses, et il est possible que Poquelin, à l’exemple de beaucoup de pères, n’ait pas trouvé à propos que son fils prît ce grade onéreux. Après les deux années de philosophie on faisait une année de théologie, puis une année ou deux de droit canon. On allait ensuite à Orléans, non pas pour étudier, puisqu’on s’y rendait ordinairement pendant les vacances, mais pour prendre ses lettres de licence en l’un et l’autre droit. Là encore, l’essentiel était de payer, et l’on était toujours assez savant quand on acquittait les droits. Le jeune licencié revenait à Paris pour s’y faire recevoir avocat.

Poquelin suivit, dit-on, le prince de Conti dans toutes ses classes. Mais les mœurs d’alors ne permettaient pas qu’ils fussent camarades. Le fils du tapissier se lia au contraire très intimement avec son condisciple Chapelle. Chapelle était fils naturel du maître des comptes Luillier, à qui ses contemporains trouvaient l’air qu’on donne à Rabelais, et chez qui Gassendi descendait dans ses voyages à Paris. Le bon prêtre finit même par se loger dans cette maison opulente et libérale. Si Poquelin, comme on le croit, fréquenta chez le maître des comptes Luillier, il y vit sans doute, avec Gassendi, Bernier, Cyrano, Henault, un petit groupe de libertins ainsi que Chapelle. Poquelin y devint quelque peu gassendiste et épicurien. C’est à cette époque qu’il commença, à ce qu’on dit, une traduction en vers du poème de Lucrèce, dont