Page:Anatole France - Le Génie latin.djvu/117

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proposition qu’on leur fît et quelque avantage qu’ils pussent trouver ailleurs[1]. »

Cela est bien à a louange de Molière, et l’on ne peut pas plus douter de la bonté de son cœur que de la grandeur de son esprit.

Pendant que M. de Ratabon démolissait la salle du Petit-Bourbon et aménageait la salle du Palais-Royal, la troupe délogée donnait des représentations chez le maréchal de la Mailleraye, chez La Basinière, trésorier de l’épargne, chez le duc de Roquelaure, chez le duc de Mercœur, chez le comte de Vaillac.

La salle du Palais-Royal fut livrée aux comédiens dans les premiers jours de l’année 1661. Elle était vaste et très belle. Le cardinal de Richelieu y avait fait jouer la tragédie de Mirame et donné des spectacles magnifiques. La troupe de Monsieur l’inaugura le jeudi 20 janvier i<56i avec le Cocu imaginaire, qui réussit très bien. On reprit ensuite les Précieuses, qui firent beaucoup d’argent.

Le 4 février, Molière donna Don Garcie, prince de Navarre, dont le su]et est tiré soit d’une comédie italienne de Cicognini, soit directement de la comédie espagnole, imitée par Cicognini. De l’un ou de l’autre de ces exemplaires, Molière avait tiré une tragi-comédie qui tomba. À la septième représentation la recette était descendue à soixante-dix livres. Molière retira sa pièce. Il lui fallut renoncer à Melpomène et cesser de se mesurer avec l’auteur de Don Sanche, ce qui dut lui être sensible, car il aimait le tragique.



  1. Registre de La Grange, pp. 25 et 26.