Page:Anatole France - Le Génie latin.djvu/235

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de la fortune » ; non point qu’il fût cupide, mais ce n’est pas à cinquante ans et plus qu’on tente, de gaieté de cœur, les aventures de la pauvreté.

A deux ou trois ans de là, il entendait, sous les arbres des promenades publiques, des mères, des nourrices par centaines qui disaient : k Paul, soyez tranquille… Venez là, Virginie. » Il était le parrain de toutes ces Virginies et de tous ces Pauls dont il avait fait pleurer les mères.

Enfin la reine Marie-Antoinette, étant à dîner chez la comtesse de Polignac, son amie, parla des Études de la nature, à propos de ces oiseaux que décrit Bernardin et qui ont des poitrines rouges dans la saison des amours. Ainsi, semant partout les images les plus aimables, il recueillait ïeg plus beaux sourires. On le proclamait digne de la table des dieux et du lit des déesses. Par un contraste mieux fait encore pour piquer que pour déplaire, il était grognon, boudeur sous tant de caresses. Étant venu avec son chien à la Malmaison, chez Mmo Lecoulteux de Moley, il y gémissait. Son chien fut malade ; on le drogua, il mourut. Un jour, Bernardin n’étant point descendu pour le déjeuner, on envoya dans sa chambre. On y trouva un billet où il disait qu’on avait tué son chien et qu’il était parti. Les dames s’attendrirent ; elles firent au chien, à l’ami du sage, des funérailles et un tombeau, dans le jardin, sous un saule.

En 1789, il reçut du roi une pension de 1.200 livres. Paul et Virginie l’eût enrichi sans les contrefaçons, qui furent innombrables.

Au mois de septembre de la même année, il publia