Page:Anatole France - Le Génie latin.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Bordeaux) voulust mettre en liberté un nommé André Mélanchton[1], accusé d’hérésie et prisonnier en la Conciergerie du palais[2]. »

On n’en finirait pas de nommer toutes les victimes qu’elle arracha aux bourreaux.

Son frère songea à la marier à Henri VIII d’Angleterre, qui négociait alors avec Rome un divorce odieux. On frémit en songeant à la vie qu’eût menée l’intelligente et douce Marguerite auprès de ce gros homme pédant et cruel. C’est Anne Boleyn, la haque-née d’Angleterre, qui prit la place de Catherine répudiée. Marguerite, échappée à cet épouvantable danger, épousa, le 24 juillet 1527, Henri II d’Albret, roi de Navarre, petit roi fort pauvre. Cette union lui avait été imposée, comme la première, pour des motifs politiques. Elle avait alors trente-cinq ans. Ce second mari était : beaucoup plus jeune qu’elle, au rebours du premier, qui était beaucoup plus âgé. Elle fit de son petit royaume l’asile des persécutes. Des Périers, de la Haye, du Moulin, Brodeau, Gruget, Le Maçon, Denisot, Pelletier, Lefebvred’Étaples,Lecomte, d’Arande, Toussaint, trouvèrent à Nérac un asile honorable. On accusa Marguerite de penser comme ceux qu’elle protégeait. Et cette accusation était assez fondée. Noël Béda, syndic delà Faculté de théologie, déféra à la Faculté un poème de la reine de Navarre intitulé le Miroir de l’âme pécheresse. L’auteur n’y parlait

  1. Neveu de l’illustre réformateur.
  2. Florimond de Rœmond.